C’est Alpha Oumar Konaré qui a
décidé qu’Amadou Toumani Touré deviendrait président en 2002. A l’issue du
premier tour ATT arrive en tête en 2002, avec une marge de 1% devant Soumaïla
Cissé, dans un mouchoir de poche. Et la commission électorale annule 500000
votes, environ 10% du corps électoral. Pour 300000 votes de plus on a déclenché
le feu sur Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire l’année dernière. (…) Il y a eu des
manipulations pour que ce soit Soumaïla Cissé et non Ibrahim Boubacar Keïta
(IBK) qui arrive en seconde position. Des missions d’observation des élections
étaient là, mais on s’est contenté des résultats. (…) En 2007, rebelote. ATT
est élu dès le premier tour avec près de 70% des suffrages et un taux de
participation de 30%, ce qui veut dire que 21% des électeurs maliens l’ont
choisi. Cela fait une légitimité extrêmement faible. Et même sur ce scrutin,
nous savions très bien que les fraudes ont été très importantes. C’est ça, la
démocratie malienne.» a déclaré le diplomate lors d’un colloque à l’Institut
français des relations internationales (Ifri), selon des propos rapportés par
Slate Afrique.
«Seule la façade est tombée et
les déterminants de la crise étaient là depuis longtemps: corruption impliquant
toutes les sphères, au plus haut niveau, jusqu’au palais présidentiel de
Koulouba, une économie largement informelle (…), des trafics en tout genre. (…)
C’est pathétique, le discours de la classe politique malienne est pathétique!
Pas un homme ne sort du lot… »
Le Burkina Faso en prend aussi
pour son grade : selon Laurent Bigot, il est un «élément perturbateur
dans la médiation qui a aggravé la crise au Mali» et il pourrait bien subir
la même crise : «Ce n’est pas passé loin il y a un an, ça peut tout à
fait se reproduire. Il n’y a pas d’armée, pas de classe politique, une société
civile plus ou moins organisée et surtout une économie en coupe réglée par le
clan présidentiel, une corruption qui dépasse l’entendement, une implication
dans les trafics de la sous-région jusqu’au proche entourage du président».
Pour le dirigeant du Quai
d’Orsay, on peut reprocher à la France «un sentiment de supériorité et une
paresse intellectuelle» qui l’ont empêchée de faire la bonne analyse de la
situation, mais il n’est pas question de tenir l’ancienne puissance coloniale
pour responsable de ce délitement : «Si les Africains veulent la
démocratie, c’est à eux d’en payer le prix (…) C’est votre pays, souverain
depuis 50 ans. Il faut arrêter de dire que c’est la faute aux anciennes
puissances coloniales. Tout ça c’est de la foutaise! Les choses ont bien
changé, heureusement. Plus de la moitié de la population n’a pas connu l’époque
coloniale.»
Pour Laurent Bigot,
sous-directeur pour l’Afrique de l’Ouest au ministère des Affaires étrangères,
le Mali est «une démocratie de façade »
Lu sur: http://agenceecofin.com/avis-d-expert/3007-5996-un-diplomate-francais-fustige-la-classe-politique-du-mali-et-du-burkina